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La baronne faisait tresser les cheveux follets qui se jouaient sur sa nuque et qui sont un signe de race . Cette natte mignonne , perdue dans la masse de ses cheveux soigneusement relevés , permettait à l' oeil de suivre avec plaisir la ligne onduleuse par laquelle son col se rattachait à ses belles épaules .
Ce petit détail prouvait le soin qu' elle apportait toujours à sa toilette . Elle tenait à réjouir les regards de ce vieillard . Quelle charmante et délicieuse attention ! Quand vous verrez une femme déployant dans la vie intérieure la coquetterie que les autres femmes puisent dans un seul sentiment , croyez - le , elle est aussi noble mère que noble épouse , elle est la joie et la fleur du ménage , elle a compris ses obligations de femme , elle a dans l' âme et dans la tendresse les élégances de son extérieur , elle fait le bien en secret , elle sait adorer sans calcul , elle aime ses proches comme elle aime Dieu , pour eux - mêmes .
Aussi semblait - il que la Vierge du paradis , sous la garde de laquelle elle vivait , eût récompensé la chaste jeunesse , la vie sainte de cette femme auprès de ce noble vieillard en l' entourant d' une sorte d' auréole qui la préservait des outrages du temps .
Les altérations de sa beauté , Platon les eût célébrées peut - être comme autant de grâces nouvelles .
Son teint si blanc jadis avait pris ces tons chauds et nacrés que les peintres adorent .
Son front large et bien taillé recevait avec amour la lumière qui s' y jouait en des luisants satinés .
Sa prunelle , d' un bleu de turquoise , brillait , sous un sourcil pâle et velouté , d' une extrême douceur .
Ses paupières molles et ses tempes attendries invitaient à je ne sais quelle muette mélancolie .
Au - dessous , le tour des yeux était d' un blanc pâle , semé de fibrilles bleuâtres comme à la naissance du nez . Ce nez , d' un contour aquilin , mince , avait je ne sais quoi de royal qui rappelait l' origine de cette noble fille .
Sa bouche , pure et bien coupée , était embellie par un sourire aisé que dictait une inépuisable aménité . Ses dents étaient blanches et petites .
Elle avait pris un léger embonpoint , mais ses hanches délicates , sa taille svelte n' en souffraient point . L' automne de sa beauté présentait donc quelques vives fleurs de printemps oubliées et les ardentes richesses de l' été .

BEATRIX (II, privé)
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