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Le nez , mince et droit , est coupé de narines obliques assez passionnément dilatées pour laisser voir le rose lumineux de leur délicate doublure . Ce nez continue bien le front auquel il s' unit par une ligne délicieuse , il est parfaitement blanc à sa naissance comme au bout , et ce bout est doué d' une sorte de mobilité qui fait merveille dans les moments où Camille s' indigne , se courrouce , se révolte . Là surtout , comme l' a remarqué Talma , se peint la colère ou l' ironie des grandes âmes .
L' immobilité des narines accuse une sorte de sécheresse . Jamais le nez d' un avare n' a vacillé , il est contracté comme la bouche ; tout est clos dans son visage comme chez lui .
La bouche arquée à ses coins est d' un rouge vif , le sang y abonde , il y fournit ce minium vivant et penseur qui donne tant de séductions à cette bouche et peut rassurer l' amant que la gravité majestueuse du visage effraierait .
La lèvre supérieure est mince , le sillon qui l' unit au nez y descend assez bas comme dans un arc , ce qui donne un accent particulier à son dédain .
Camille a peu de chose à faire pour exprimer sa colère . Cette jolie lèvre est bordée par la forte marge rouge de la lèvre inférieure , admirable de bonté , pleine d' amour , et que Phidias semble avoir posée comme le bord d' une grenade ouverte , dont elle a la couleur .
Le menton se relève fermement ; il est un peu gras , mais il exprime la résolution et termine bien ce profil royal sinon divin .
Il est nécessaire de dire que le dessous du nez est légèrement estompé par un duvet plein de grâce . La nature aurait fait une faute si elle n' avait jeté là cette suave fumée . L' oreille a des enroulements délicats , signe de bien des délicatesses cachées .
Le buste est large . Le corsage est mince et suffisamment orné . Les hanches ont peu de saillie , mais elles sont gracieuses . La chute des reins est magnifique , et rappelle plus le Bacchus que la Vénus Callipyge .
Là , se voit la nuance qui sépare de leur sexe presque toutes les femmes célèbres , elles ont là comme une vague similitude avec l' homme , elles n' ont ni la souplesse , ni l' abandon des femmes que la nature a destinées à la maternité ; leur démarche ne se brise pas par un mouvement doux .
Cette observation est comme bilatérale , elle a sa contrepartie chez les hommes dont les hanches sont presque semblables à celles des femmes quand ils sont fins , astucieux , faux et lâches .
Au lieu de se creuser à la nuque , le col de Camille forme un contour renflé qui lie les épaules à la tête sans sinuosité , le caractère le plus évident de la force .
Ce col présente par moments des plis d' une magnificence athlétique .
BEATRIX (II, privé)
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