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Au milieu de l' année 1817 , son chagrin , lentement apaisé , le laissa seul et sans défense contre la monotonie de la vie qu' il menait et qui lui pesa . Il lutta d' abord courageusement contre la Science qui se réveillait insensiblement , et se défendit à lui - même de penser à la Chimie . Puis il y pensa . Mais il ne voulut pas s' en occuper activement , il ne s' en occupa que théoriquement . Cette constante étude fit surgir sa passion qui devint ergoteuse . Il discuta s' il s' était engagé à ne pas continuer ses recherches et se souvint que sa femme n' avait pas voulu de son serment .
Quoiqu' il se fût promis à lui - même de ne plus poursuivre la solution de son problème , ne pouvait - il changer de détermination du moment où il entrevoyait un succès .
Il avait déjà cinquante - neuf ans . à cet âge , l' idée qui le dominait contracta l' âpre fixité par laquelle commencent les monomanies .
Les circonstances conspirèrent encore contre sa loyauté chancelante . La paix dont jouissait l' Europe avait permis la circulation des découvertes et des idées scientifiques acquises pendant la guerre par les savants des différents pays entre lesquels il n' y avait point eu de relations depuis près de vingt ans .
La Science avait donc marché . Claës trouva que les progrès de la Chimie s' étaient dirigés , à l' insu des chimistes , vers l' objet de ses recherches .
Les gens adonnés à la haute science pensaient comme lui , que la lumière , la chaleur , l' électricité , le galvanisme et le magnétisme étaient les différents effets d' une même cause , que la différence qui existait entre les corps jusque - là réputés simples devait être produite par les divers dosages d' un principe inconnu .
La peur de voir trouver par un autre la réduction des métaux et le principe constituant de l' électricité , deux découvertes qui menaient à la solution de l' Absolu chimique , augmenta ce que les habitants de Douai appelaient une folie , et porta ses désirs à un paroxysme que concevront les personnes passionnées pour les sciences , ou qui ont connu la tyrannie des idées .
Aussi Balthazar fut - il bientôt emporté par une passion d' autant plus violente , qu' elle avait plus longtemps dormi .
Marguerite , qui épiait les dispositions d' âme par lesquelles passait son père , ouvrit le parloir .
En y demeurant , elle ranima les souvenirs douloureux que devait causer la mort de sa mère , et réussit en effet , en réveillant les regrets de son père , à retarder sa chute dans le gouffre où il devait néanmoins tomber .
Elle voulut aller dans le monde et força Balthazar d' y prendre des distractions .

RECHERCHE ABSOLU (X, philo)
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