----- Revenir à l'écran précédent par la commande BACK -----
Le total de la dette s' expliquait facilement par la multiplicité des articles , par les précautions que nécessitait le transport de certaines substances ou l' envoi de quelques machines précieuses , par le prix exorbitant de plusieurs produits qui ne s' obtenaient que difficilement , ou que leur rareté rendait chers , enfin par la valeur des instruments de physique ou de chimie confectionnés d' après les instructions de M . Claës . Le notaire , dans l' intérêt de son cousin , avait pris des renseignements sur les Protez et Chiffreville , et la probité de ces négociants devait rassurer sur la moralité de leurs opérations avec M .
Claës à qui , d' ailleurs , ils faisaient souvent part des résultats obtenus par les chimistes de Paris , afin de lui éviter des dépenses .
Mme Claës pria le notaire de cacher à la société de Douai la nature de ces acquisitions qui eussent été taxées de folie ; mais Pierquin lui répondit que déjà , pour ne point affaiblir la considération dont jouissait Claës , il avait retardé jusqu' au dernier moment les obligations notariées que l' importance des sommes prêtées de confiance par ses clients avait enfin nécessaires .
Il dévoila l' étendue de la plaie , en disant à sa cousine que , si elle ne trouvait pas le moyen d' empêcher son mari de dépenser sa fortune si follement , dans six mois les biens patrimoniaux seraient grevés d' hypothèques qui en dépasseraient la valeur .
Quant à lui , ajouta - t - il , les observations qu' il avait faites à son cousin , avec les ménagements dus à un homme si justement considéré , n' avaient pas eu la moindre influence .
Une fois pour toutes , Balthazar lui avait répondu qu' il travaillait à la gloire et à la fortune de sa famille .
Ainsi , à toutes les tortures de coeur que Mme Claës avait supportées depuis deux ans , dont chacune s' ajoutait à l' autre et accroissait la douleur du moment de toutes les douleurs passées , se joignit une crainte affreuse , incessante , qui lui rendait l' avenir épouvantable .
Les femmes ont des pressentiments dont la justesse tient du prodige .
Pourquoi en général tremblent - elles plus qu' elles n' espèrent quand il s' agit des intérêts de la vie ? Pourquoi n' ont - elles de foi que pour les grandes idées de l' avenir religieux ? Pourquoi devinent - elles si habilement les catastrophes de fortune ou les crises de nos destinées ? Peut - être le sentiment qui les unit à l' homme qu' elles aiment , leur en fait - il admirablement peser les forces , estimer les facultés , connaître les goûts , les passions , les vices , les vertus ; la perpétuelle étude de ces causes en présence desquelles elles se trouvent sans cesse leur donne sans doute la fatale puissance d' en prévoir les effets dans toutes les situations possibles .
RECHERCHE ABSOLU (X, philo)
Page: 693